Blocage des négociations : majorité et opposition se rejettent la responsabilité

Alors que les évêques catholiques avaient misé sur une fin des travaux le samedi 21 janvier, c’était sans compter avec les atermoiements des acteurs politiques qui, visiblement semblent plutôt s’accommoder du retard pris dans l’application de l’accord du 31 décembre. Jusque vendredi 20 janvier, les rapports des commissions concernées dont celle liée à la gouvernance de la transition n’étaient toujours pas déposés sur la table de la Cénco. Et pourtant, d’aucuns pensaient, au regard des discussions intenses que les parties prenantes ont eu jeudi en informel, que les choses allaient se décanter naturellement. Le non-dépôt des rapports des commissions ne laissait aucun doute : ça continue de coincer. Le verrou qui bloque les conclusions autour de l‘arrangement particulier est toujours en place au grand dam des évêques qui, peu à peu, commencent à perdre patience. 
Finalement, qui bloque la dynamique ? L’opposition pointe un doigt accusateur sur la majorité présidentielle (MP) qui se serait écartée des prescrits de l’accord de la Saint-Sylvestre en cherchant à imposer ses vues notamment sur le mode de désignation du Premier ministre. Là-dessus, les deux camps ont une perception différente sur la question. Alors que le Rassemblement en a présenté qu’un seul candidat au poste de Premier ministre conformément à l’accord qui lui en donne le droit, la MP oppose le pouvoir discrétionnaire du chef de l‘État qui, dit-elle, doit impérativement s’exercer dans cette procédure. En clair, la MP craint qu’en tirant sa légitimité du Rassemblement qui l’a proposé au chef de l’État, le Premier ministre n’entre en conflit de compétence avec le président de la République qui se serait retrouvé devant un fait accompli en le nommant. La famille politique de Joseph Kabila n’entend pas cautionner la désignation de n’importe quelle personnalité à ce niveau de responsabilité lorsqu’on sait « qu‘un Premier ministre est censé être, par sa fonction, le premier et le principal collaborateur du chef de l’État ».  Voilà pourquoi la MP suggère au Rassemblement de proposer trois à cinq noms sur lesquels Joseph Kabila devra opérer le choix en vertu de son pouvoir discrétionnaire.
Là-dessus, aucune partie n’entend faire une concession. Tout comme dans la répartition des postes au sein du prochain gouvernement et du Conseil national de suivi de l’accord (CNSA). La MP entend répartir des postes ministériels sur la  base d’une configuration dite classique des composantes (opposition, majorité présidentielle et société civile). Une proposition qui ne passe pas au Rassemblement qui y voit une insulte à l’accord du 31 décembre entre signataires et non signataires de l’accord du 18 octobre de la Cité de l‘UA. C’est sur ces deux grands blocs qui se sont dégagés de fait qu’il faudra tabler, de l‘avis du Rassemblement, pour assurer une répartition équilibrée des postes sans léser personne. Au sein du CNSA, la MP, encore elle, veut avoir la part du loin en ne concédant qu’une infime portion à l’opposition qui, bien que placée à la tête de cette structure, veut jouer un rôle de premier plan.
C’est autant dire que l’adoption de l’arrangement particulier sans lequel l'accord signé le 31 décembre dernier ne pourra pas être pleinement appliqué, est devenue plus compliquée que jamais. Un véritable casse-tête pour l’épiscopat catholique dont les ultimatums n’ont jamais été suivis d’effet par les participants visiblement peu soucieux du timing. Sans donner l’alternative au cas où le processus échouait (le fameux plan B n’étant connu que de la Cénco elle-même), il est un fait que les appréhensions commencent à gagner les esprits quant à l’issue heureuse de ces négociations.    
Alain Diasso

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